Passé maître dans l'art de la diversion et du mensonge, le parti CNDD-FDD au pouvoir aujourd'hui doit se réjouir de constater que les médias privés sont tombés dans un piège leur tendu par le Gouvernement car les acteurs qui ne sont pas du régime ne reçoivent pas l'occasion de donner leurs avis et positions sur les informations à très tonalités propagandistes que leur distillent lesdits porte-paroles.
Tout le monde le sait, les médias publics sont déjà confisqués par le pouvoir de Bujumbura, les médias privés eux aussi sont sur le point de l'être s'ils ne restent pas vigilants. Nos confrères doivent le comprendre. Ces conférences sont en réalité des campagnes déguisées, car n'accordant la parole qu'aux acteurs d'une seule sensibilité politique. Il ne sera pas étonnant que demain, ces conférences soient organisées à un rythme très régulier pour consacrer un matraquage médiatique sans précédent. La dernière conférence s'est déroulée loin, très loin de Bujumbura. Pourquoi une conférence de presse de journalistes devrait-il s'organiser à Kirundo ou à Muyinga, ou dans une autre région, loin, très loin de la capitale ? Loin de nous l'idée de ne pas accorder de considération aux régions de l'intérieur du pays. Mais outre le coût exorbitant qu'occasionnent les dépenses de telles randonnées, et pour l'Etat, et pour les organes privés (qui par définition maximisent les bénéfices en réduisant les coûts), les journalistes risquent d'être prix dans le piège d'une corruption douce, mais combien efficace : s'habituer à quelques douceurs d'un pouvoir qui ne ménage rien pour acheter les consciences. Sans formellement formuler aucune accusation, les médias privés risquent de se retrouver en train de faire une campagne pour le pouvoir de Bujumbura, parfois involontairement
L'éthique et la déontologie professionnelle des journalistes prônent l'équité, l'équilibre de l'information. Quel est cet équilibre actuellement quand des gens passent plus de trois heures à parler seuls sans idées contradictoires ?
Nos confrères doivent élargir le débat aux autres formations politiques. Le pouvoir, à travers ses portes paroles ne fait rien d'autres que vanter ses réalisations, de la pure propagande en quelque sorte. Comment se sortir du piège ? Organiser conjointement ces conférences avec les représentants des partis d'opposition et de la société civile, ou alors laisser ces porte-paroles organiser des conférences publiques. Ainsi n'importe quel citoyen leur posera des questions. Ou alors aussitôt que de telles conférences publiques sont organisées avec les portes paroles, organiser juste après celles des représentants de l'opposition pour donner leur point de vue. Autrement il ne s'agira ni moins ni plus que de séance d'instrumentalisation des medias et des journalistes burundais, instrumentalisation nuisible à la démocratie et au débat d'idées.