Manif à Washington donc, manif à Toronto et comme une trainée, manif dans la capitale européenne. D'où le titre assez plat, nous nous en convenons, de RPA ''après la diaspora burundaise du Canada, c'est le tour de celle vivant en Belgique''. Objectif de Bruxelles : ''de protester contre la tentative du président Nkurunziza de briguer un 3e mandat'', précise RPA.
La plupart des sites et journaux ont privilégié l'image à l'écrit, plusieurs sites ont renvoyé dans le monde entier les images de ces citoyens de la paix. Bujumbura news nous a offert ''Quelques images de la manifestation à Bruxelles contre la dictature au Burundi ''. Même chose avec Arib qui nous donne des ''infos en image'' qui ont contredit les propos de REMA FM du même 1er avril qui s'est égosillé à longueur des nuits et des journées à minimiser l'impact de ces manifestations auxquelles n'auraient participé qu'une vingtaine de personnes, selon la radio. Cndd-burundi.com a par contre marié l'image et la parole, des photos choc de ces manifestants banderoles et pancartes à la main et un long reportage très détaillé, trop détaillé même, car aucun détail ne fut omis. ''L'ADC-IKIBIRI manifeste devant le siège des institutions de l'Union européenne-UE'', titre le site du parti CNDD de Léonard Nyangoma. Le reportage explique pourquoi le choix du lieux et pourquoi précisément cette date du 1er avril. On ne peut que vous renvoyer au cndd-burundi.com pour les détails sur l'identité des manifestants, leurs revendications... et surtout sur le contenu du message remis par Léonard Nyangoma, au nom des manifestants, à la responsable de l'UE chargé du Burundi. ''Pour décrocher un troisième mandat, le Président Pierre Nkurunziza instaure le monopartisme, le terrorisme d'Etat et la menace d'un conflit politico-ethnique plane sur le Burundi'', dénonce explicitement le message.
D'où le titre alors de Arib.info, ''Nyangoma à la tête de la manifestation devant le siège de l'UE à Bruxelles'', titre Arib.info qui nous apprend aussi que les manifs sont apparemment contagieuses, car une autre manifestation burundaise est prévue ce samedi à Londres.
''Pourquoi j'irai manifester le 1er avril 2014'', avait prévu cette fille de bonne famille aujourd'hui âgée de 16 ans qui fut victime d'un trafic d'ampleur récemment mis au jour dans ce petit pays d'Afrique des Grands Lacs par une ONG canadienne. Elle était à la place Schuman pour '' dénoncer les violences sexuelles faites aux mineurs et la multiplication des maisons closes au Burundi'', dit-elle à travers Burundi Transparence.
Un autre qui ne s'est peut-être pas trompé de véritables intentions du président burundais, c'est Jeune Afrique. ''Nkurunziza veut passer en force'', a titré ce journal pour qui face à une opposition contestataire du troisième mandat, ''Le président Pierre Nkurunziza riposte. En cognant''. Le journal faisait référence au scandale policier du 8 mars où la manif de l'ADC-IKIBIRI a été réprimée dans le sang. '' Du gaz lacrymogène, des matraques, des foules dispersées par des tirs à balles réelles : depuis deux mois, la force et la violence éclipsent le débat politique, cristallisé autour d'une éventuelle révision de la constitution'', a écrit le journal dans sa livraison du 02.04.2014.
Le très célèbre Nyabusorongo temporise le débat centré sur le candidat-président: '' S'intéresser plutôt aux élections libres et transparentes et non au candidat Nkurunziza'' titre le site ouvertement pro-gouvernemental ou du Cndd-FDD, et pour qui ce dernier est en effet perçu comme , ''un partenaire sûr pour nos partenaires pour garantir le maintien de nos troupes en Somalie et en RCA'', une présence militaire à laquelle s'oppose l'opposition burundaise, laisse entendre le site. ''L'opposition gagnerait à revoir sa copie et ses ambitions à la baisse... attendre que Nkurunziza soit légalement candidat pour crier au scandale'', précise le site, sinon ajoute-t-il, '' la communauté internationale fait pression sur le régime de Bujumbura non pas pour écarter le président Nkurunziza de la compétition, mais pour qu'il y ait des élections libres et transparentes'', raison pour laquelle l'opposition devrait se centrer, non sur le candidat, mais sur la transparence des élections.
N'en déplaise à Nyabusorongo, Afrique Education, dans sa livraison 388-389 et cité par Arib.info titre ''Candidature pour un 3è mandat : suicide politique pour Nkurunziza''. Comme tant bien d'autre, le journal se demande ''Jusqu'où ira Pierre Nkurunziza pour un 3e mandat ?''. En tout cas, prévoit et prévient le journal : ''le rouleau compresseur va être déployé contre Pierre Nkurunziza, s'il s'entête à se représenter, pour un troisième mandat auquel il n'a pas droit.''
Alexis Sinduhije président du MSD
La première sortie médiatique de l'opposant Alexis Sinduhije après les affres du 08 mars a aussi nourri les titres des journaux et sites. '' De sa cachette , Alexis Sinduhije défie le pouvoir de Bujumbura'', '' L'opposant Alexis Sinduhije se dit prêt à donner sa vie'', titre Arib.info, ou encore Alexis Sinduhije rompt le silence, un titre accompagné d'une vidéo où le président du MSD dit clairement qu'il continue la lutte jusqu'au renversement du pouvoir, quel qu'en soit le prix. '' je suis prêt à mourir pour mon combat'', titre en effet IWACU, alors que Bujumbura news titre : '' Alexis Sinduhije se dit prêt à sacrifier sa vie''. RPA constate tout simplement que '' Alexis Sinduhije se décide à parler après le fameux 8 mars''. De son côté Burundi Information confirme que Alexis Sinduhije est '' prêt à tout''
De l'opposant du MSD, il en a été question aussi dans Bujumbura Information, mais sur un registre légèrement différent. Le site, citant Flash info de radio Bujumbura FM nous apprend que, un certain CIRAMUNDA, colonel de son état, et à la tête d'un sombre Mouvement National Burundais, '' approuve l'engagement politique de Sinduhije''. Un rapprochement qui pourrait ''précipiter la chute du régime Nkurunziza'', nous rapporte le site.
Dans l'attente d'une chute que beaucoup de burundais appellent de leurs vœux, la situation socio-politique se dégrade chaque jour un peu plus. Les Imbonerakure, ces milices du parti au pouvoir, sont parmi les principaux acteurs de ce triste bilan. Ils s'activent dans la perturbation des activités des autres partis politiques. Reprenant RTNB.BI, BUJUMBURA news constate avec amertume que ''les militants du parti FRODEBU ont été blessés par ceux du CNDD-FDD en commune et province KIRUNDO''.
IWACU.org donne une dimension ethnique à l'incident confirmant que '' Les Tutsi de Bugabira ont peur''. Une trentaine de Tutsi de Bugabira auraient fui vers le Rwanda. Ceux qui sont restés accusent les Imbonerakure et l'administration d'avoir un plan de les tuer. Rumeurs sans fondement, rétorquent les autorités. Ce ne sont certainement pas les seuls Tutsis à avoir peur, semble se reprendre le site dans ce titre : '' quand les démons de l'intolérance se réveillent''. Il fait état d'une rixe opposant ''des jeunes militants du CNDD-FDD'' de la colline Shinge à Kirundo et ceux du parti Sahwanya-Frodebu de Rugero et il y aurait eu morts d'hommes. Il ne s'agirait donc pas d'une question d'ethnie, mais de conflit politique.
La crise à l'université du Burundi continue aussi d'empester la vie socio-politique. Le bras de fer étudiants-gouvernement se poursuit. '' les étudiants des Universités décidés à faire plier le Gouvernement'' titre Arib info qui reprend les propos d'RFI pour qui ''face au gouvernement, les étudiants ne cèdent pas''. Le pouvoir semble en tout cas très embarrassé surtout face à la détermination et à l'argumentation des étudiants. Des arguments confirmés par un Sénateur, Emmanuel Nkengurutse pour ne pas le citer. L'homme des lois lie en effet la question de la bourse d'étude au respect des droits de l'Homme, car dans son analyse, il tente de démontrer que ''les nouvelles mesures d'octroi de la bourse aux étudiants violent la norme de l'égalité et de la non-discrimination''. Le sénateur est vite rejoint par le professeur Libera Ntibashirakandi qui propose quelques pistes de solution pour résoudre la crise après avoir démontré que ''les enfants des pauvres ont eux-aussi droit d'accès à l'enseignement universitaire !'' ; C'est dans Arib.info.
Les étudiants ont aussi bénéficié d'un grand appui du côté où ils s'y attendaient le moins, depuis que notre parlement est devenu le porte-voix de l'exécutif. ''Les Députés appellent à l'allégement des sanctions envers les étudiants'', nous apprend Arib.info, c'est le président de la Commission Permanente chargée des questions d'éducation à l'Assemblée nationale qui l'aurait demandé. Une réponse peut-être à la question du porte-parole du CNDD, François Bizimana à Radio Isanganiro : "Pourquoi les Députés n'ont pas encore convoqué le ministre de l'Enseignement supérieur pour lui demander pourquoi les cadres de demain sont dans la rue" ?, fait observer Arib.info qui nous informe en même temps la peur est dans l'air depuis que des risques de manifestations des élèves du secondaire dans tout le pays sont dans l'air'.
Dans ce bras de fer, le gouvernement semble avoir opté pour le maintien de sa position et RFI constate '' l'échec de la stratégie de fermeté face aux étudiants grévistes''. Et pour preuve, le gouvernement a prolongé et reprolongé les dates limites pour la réinscription des étudiants, mais force est de constater avec nos confrères que tous ces appels n'ont pas été entendus.
Malgré ce marasme socio-politique, et contre toute attente, le Burundi obtient '' la Médaille d'Or au Forum Crans Montana Edition 2014'' à Bruxelles. Oui, on ne rêve pas. Il l'a reçu ''en qualité de pays post-conflit qui, malgré les nombreux problèmes liés à son passé récent, s'est démarqué en matière de redressement et de la mise en place des réformes économiques importantes pour son développement notamment dans l'amélioration du climat des affaires''. Les affaires des autres, et pas celles des burundais en tout cas, car le Burundi est devenu le meilleur élève du système néolibéral dans la région, malgré que ce système soit à l'origine de la crise économique et financière actuelle dans le monde. Le prix a donné de l'air frais à un gouvernement qui étouffe, il a sorti un gros communiqué d'une victoire contre tous ceux restent aveugles à ses nombreuses réalisations.
Les acteurs en diplomatie gardent eux la tête froide et haute, Burundi-Information, citant OIF nous apprend que ''la Francophonie appelle les Burundais à "faire preuve de la plus grande retenue" au cours de la 91e session du Conseil permanent de la Francophonie. Sur le Burundi, Abdou Diouf a déclaré que « les risques sont réels de voir la situation encore davantage après les violentes confrontations qui ont opposé, il y a trois semaines, forces de l'ordre et opposition. J'exhorte les autorités burundaises, ainsi que l'ensemble des partis politiques, à faire preuve de la plus grande retenue et à engager dans les meilleurs délais un dialogue approfondi afin de régler pacifiquement leurs désaccords, conformément à l'esprit des Accords d'Arusha ». Il a également appelé les autorités burundaises à lever « immédiatement les restrictions aux libertés d'expression, d'association et de réunion imposées récemment » Toujours en diplomatie, la visite au Canada du chef de la diplomatie burundaise n'aura pas passé inaperçue, et surtout les propos de son homologue canadien. Le ministre Baird a tenu à souligner ''l'importance de protéger les progrès accomplis depuis la signature, en 2000, de l'Accord d'Arusha pour la paix et la réconciliation et à encourager la tenue d'un dialogue constructif entre le gouvernement, les partis politiques et toutes les couches de la société burundaise''. Aura-t-il été entendu ? le doute est permis.