Dans ce contexte, que peut-on attendre de cette nouvelle commission qui sera chargée d'enquêter sur les allégations d'exécution des combattants capturés lors des combats dans la Province de Cibitoke en date du 30 Décembre 2014 au 3 Janvier 2015 ?
On prend les mêmes et on recommence.
Souvenons-nous des corps sans vie flottants sur de différentes cours d'eau, des corps décapités retrouvés ici et là dans les buissons de Bugarama, de Gitega, de Kivoga, ..., des têtes ramassées dans les fosses septiques entre 2010 et 2012. Ces évènements macabres avaient marqué la période postélectorale des élections générales de 2010. Les organisations de défense des droits de l'homme et les Nations Unies avaient considéré qu'il s'agissait dans un certain nombre de cas des exécutions extrajudiciaires. « Le Conseil de sécurité de l'ONU a répertorié des dizaines de cas d'exécutions extrajudiciaires au Burundi depuis deux ans : 16 ayant eu lieu à la fin de 2010 et 61 en 2011. De son côté, l'organisation américaine Human Rights Watch a dénoncé des centaines de cas au cours de la même période. »1
Quant à Amnesty International, il introduisait ainsi son rapport de 2012 sur le Burundi : « L'impunité, toujours très répandue, était de plus en plus ancrée dans la société. Le nombre d'exécutions extrajudiciaires et d'homicides à caractère politique a augmenté. La justice était toujours politisée. Les défenseurs des droits humains et les journalistes étaient en butte à une répression accrue. »2
Au Burundi au moins 400 à 750 personnes meurent chaque année, assassinées par le régime dans le but déraciner toute voix qui dérange quelle que soit sa dimension. Le régime fait le nettoyage pour éliminer les soit disant subversifs, leurs collaborateurs, leurs sympathisants pour finir en s'attaquant aux indifférents et les indécis.
A la suite de toutes ces dénonciations, notre Procureur Général de la République, l'inoxydable BAGORIKUNDA Valentin avait mis en place une commission présidée par le substitut du procureur Manirakiza Adolphe. C'est la stupéfaction générale qui accueillit les résultats de l'enquête qui concluait : « il n'y a pas eu d'exécutions extrajudiciaires », avait déclaré dans sa conférence de presse du 23 août 2012 le super juge BAGORIKUNDA.
A la suite des nombreux rapports qui dénoncent l'exécution des dizaines de combattants qui s'étaient rendus lors des attaques de décembre 2014 à Cibitoke, c'est le même Bagorikunda qui met en place une commission, présidée par le même Manirakiza ! En bon fanatique du football, NKURUNZIZA sait que l'on ne change pas une équipe qui gagne ! Et les conclusions de l'enquête sont déjà dans les tiroirs. Le délai d'un mois accordé à la commission d'enquête ne sert qu'à faire semblant et à « justifier » des dizaines de millions des contribuables burundais qui ne manqueront pas de sortir des caisses de l'Etat.
Les griots de notre république bananière vont tirer à boulets rouges sur mon écrit en disant : voyez-vous, il nous juge déjà avant même que nous ne commencions notre travail. Je serais le premier heureux si je venais à être démenti par les faits. Mais qu'attendre vraiment d'un « système » qui a inversé les valeurs ? Qu'attendre d'un régime qui a érigé le gangstérisme, le meurtre, le déni de justice, le mensonge, la cupidité et la cleptomanie en qualités exigibles pour ses dirigeants ? Qu'attendre d'un régime qui ose froidement décapiter trois inoffensives nones qui de surcroît octogénaires ? Entretemps, le régime jette en prison un journaliste qui a tenté de mener les investigations sur ce crime pour montrer que le domaine est réservé et que nul n'a le droit de s'approcher à la table s'il n'est pas invité.
Chers compatriotes, prions, mais prions en nous mobilisant pour chasser « les diables » de la tête notre pays. C'est une urgence nationale.
1. Jeune Afrique du 2 octobre 2012.
2. Rapport d'Amnesty International 2012.