Seuls les agriculteurs continuent de gratter la terre stérile de nos nombreuses collines pour que ceux qui vont survivre ne meurent pas de faim, précisent-ils. Mais qui survivront à quoi ? Dans certaines localités les médias font état des départs en exil à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. C'est dire que la psychose de troubles violents à l'occasion des élections semble gagner la majorité de la population. Et le régime de Nkurunziza ne fait rien pour rassurer, bien au contraire.
Des faits inquiétants
1°) La milice imbonerakure : Il n'est un secret pour personne, que ces jeunes qui officiellement ne constituent que « la pépinière » du parti, sont en réalité une véritable milice armée. Ils ont reçu une formation en matière de maniement des armes à feu notamment à Kiliba (Est de la RDC), et des armes leur ont été distribuées par dizaines de milliers. Ils seraient disséminés dans tout le pays, les exactions sont quotidiennes à l'encontre de tous ceux qui ne sont pas affiliés au parti CNDD-FDD et n'attendent plus que les consignes pour débuter la grande terreur.
2°) Les récentes attaques de CIBITOKE, l'exécution sommaire des dizaines de rebelles qui s'étaient pourtant rendus, la participation aux combats des miliciens imbonerakure aux côtés des forces armées et le black-out total sur l'identité des assaillants.
3°) Le tripatouillage grotesque du processus électoral dont le plus marquant reste les fraudes grossières qui ont marqué la délivrance des cartes d'identités nationales et l'inscription au rôle électoral.
4°) Les crimes horribles des agents du pouvoir dont le plus effroyable est la décapitation en septembre dernier (eh oui, comme l'Etat Islamique !) des trois religieuses catholiques d'origine italienne, âgées de 75 ans à 82 ans. Un témoin a révélé sur les ondes de la RPA que le commanditaire ne serait personne d'autre que le Général Adolphe NSHIMIRIMANA ex patron de la police politique et actuellement chargé de missions du président NKURUNZIZA.
5°) La persécution des hommes politiques, des personnalités de la société civile, des journalistes ainsi que des artistes notamment des musiciens obligés de vivre en clandestinité. Ainsi le célèbre défenseur des droits de l'homme Pierre Claver MBONIMPA a passé plusieurs mois en prison en 2014, avant de bénéficier de liberté provisoire grâce à la pression des occidentaux notamment de Barack OBAMA. Le directeur de la RPA, le journaliste Bob RUGURIKA est actuellement en prison en raison des révélations faites sur la radio dont il est directeur sur l'assassinat des trois religieuses.
Par ailleurs, la population paupérisée, révoltée par la corruption, la gabegie, le clientélisme, l'injustice, la violence et l'arrogance des nouveaux oligarques est déterminée à sanctionner le régime du CNDD-FDD.
Tout cela crée une atmosphère explosive, le Burundi ressemblant à un volcan en phase pré éruptive.
Faut-il aller aux élections dans ces conditions ?
Les élections dans cette atmosphère ne pourront être ni libres, ni transparentes encore moins apaisées. Le risque majeur est de voir le processus électoral déboucher sur des violences généralisées. Le bon sens exigerait de sursoir à ces élections et, enclencher un dialogue entre l'opposition et le régime afin de créer un climat plus apaisé.
Mais cela le pouvoir n'en veut pas, parce que des élections dans un contexte chaotique est une aubaine pour NKURUNZIZA et ses généraux acolytes. Le tripatouillage n'en sera que plus facilité.
Les bailleurs de fonds, c'est-à-dire les occidentaux appelés communément Communauté Internationale, ont une autre lecture de la situation. Il semble que certains considèrent NKURUNZIZA et son parti comme garants de la stabilité. Et leur « chanson » est toujours la même : il vaut mieux de mauvaises élections que pas d'élections du tout.
Mon avis est que tout ceci sont des arguments on ne peut plus fallacieux. Aucun régime qui affame, qui paupérise sa population ne peut garantir la paix. Rappelons que ce sont la famine et la misère qui ont constitué le terreau de la Révolution française de 1789 ! Certes des élections ont été organisées dans un contexte chaotique sous d'autres cieux. Ce fut le cas en Irak ou en Afghanistan, mais plus de dix ans après, ces pays sont toujours en guerre. Sauf si c'était l'objectif ! Ici, il ne s'agit pas de ne pas organiser des élections mais de les reporter, le temps de créer un climat favorable.
Quant à l'Union Africaine, comme d'habitude c'est le mutisme absolu, et ce sera comme l'on dit familièrement comme « un médecin après la mort », juste pour constater les dégâts. Les dirigeants de la région sont tétanisés par les calculs de géopolitique alors que leurs pays ne seront pas épargnés par la déstabilisation en cas d'explosion de violence chez leur voisin.
Dans ce contexte, le peuple burundais semble abandonné à lui-même. Son salut résidera dans sa cohésion, surtout en résistant aux sirènes de tribalisme et de régionalisme. La misère, l'injustice, la faim et tous les autres maux frappent indifféremment les Twa, les Tutsi et les Hutu, du nord comme du sud, de l'est comme de l'ouest en passant par le centre.
J'ai alors envie de crier : peuple du Burundi, unis-toi et tiens bon !