Une atmosphère plutôt de guerre que d'élections.
Depuis le 25 avril 2015, jour où Nkurunziza s'est fait investir candidat du parti CNDD-FDD à l'élection présidentielle, le Burundi est en ébullition. Les manifestations contre un troisième mandat anticonstitutionnel n'ont jamais cessé malgré une répression sanglante, à Bujumbura comme dans plusieurs localités du pays. Et depuis quelques jours la population de la capitale passe des nuits cauchemardesques ponctuées de tirs de fusils automatiques, et d'explosion de grenades, des fouilles des domiciles en pleine nuit, des assassinats ciblés et des arrestations. Le Service National de Renseignement, la police et les miliciens imbonerakure traquent tout opposant déclaré ou supposé au troisième mandat de Nkurunziza.
Les flots des réfugiés qui quittent le Burundi croissent chaque jour. Très récemment ce sont deux proches collaborateurs du président Nkurunziza qui ont prix le chemin de l'exil : le 2ème Vice-président de la République et le Président de l'Assemblée Nationale ont fui le pays pour se réfugier en Europe.
Le déroulement du scrutin.
Comme l'on pouvait s'y attendre, la population a boudé les urnes. Dans plusieurs localités du pays les autorités administratives et les miliciens imbonerakure ont contraint la population à se rendre dans les bureaux de votes. Dans certains cas, l'on a assisté à des scènes ubuesques où les zélés du pouvoir ont fait le porte à porte les urnes à la main et ont obligé les gens à voter, même quand leurs noms ne figuraient pas sur les listes électorales ! L'appel au boycott lancé par l'opposition, la société civile et l'Eglise catholique a été largement entendu. Mais cela Nkurunziza et ses amis oligarques s'en fichent complètement. Il ne devrait étonner personne si sa CENI donne des taux de participation atteignant ou même dépassant les 80 pour cent. Les élections ont été organisées par et pour Nkurunziza et sa clique !
L'agenda du peuple.
Pour le CNDD-FDD et Nkurunziza, les élections constituent une fin en soi. Il s'agit d'obtenir un quitus de piller et d'opprimer « légalement ». Pour la population et pour les démocrates, les élections est un moyen légitime et légal par lequel le peuple désigne librement ses dirigeants pour une période donnée. Les élus ont le devoir d'être à l'écoute et au service de la population. Nkurunziza tenait donc à ses simulacres d'élections, dans le cafouillage total, parce qu'il sait que les burundais ne pouvaient plus jamais confier librement leur destin à des dirigeants dépourvus d'un minimum de sens de leadership. Si Nkurunziza et son CNDD-FDD pensent avoir atteint leur objectif, cela est leur affaire. Le peuple a son propre agenda. Il poursuit sans relâche son combat pour l'instauration d'une véritable démocratie pour que plus jamais, aucun président, fusse- t-il envoyé du diable, ne vienne encore imposer ses volontés au peuple.
Le funeste labo de tripatouillage des élections de Nkurunziza, appelé abusivement CENI, va probablement offrir quelques voix à certains partis non affiliés au CNDD-FDD, histoire de jeter l'appât afin de diviser l'opposition. Aucun leader averti et engagé dans la lutte pour une véritable démocratie ne devrait tomber dans ce piège. Sinon, le peuple lui tournera le dos comme il l'a fait pour Nkurunziza, et la révolution se poursuivra en le laissant au bord de la route de la longue marche.
